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CHAMBRE A PART ... - Page 12

  • Deux trios 'Una Corda'

    Chers amis mélomanes,

    retour au classicisme le dimanche 20 novembre à 11h à l'Auditorium du Conservatoire de Lille (place du concert), avec deux magnifiques trios pour piano, violon et violoncelle

    le célèbre trio opus 8 de Brahms et, une découverte pour beaucoup d'entre nous, le trio de Graciane Finzi, qu'on se souvient avec plaisir avoir entendue à Lille entre 2011 et 2003

    Graciane Finzi       Trio pour piano et cordes
    Johannes Brahms  Trio pour piano et cordes no 1 en si majeur, op.8
                                   Allegro con brio     Scherzo : allegro molto      Adagio       Allegro
    Trio Una corda
    Emmanuelle Le Cann  piano, Thierry Koehl  violon, Matthieu Lejeune  violoncelle

    vous pouvez lire les notes de programme détaillées ci-dessous

    notez aussi le prochain rendez-vous dimanche 27 mai après midi, "les Beaux Serges" au Palais des Beaux-Arts de Lille, à 15h et 17h (deux concerts différents), vous pourrez entendre les quatuors de Rachmaninov et de Prokoviev par le quatuor Kryptos et un quatuor de musiciens de l'ONL, ainsi qu'une transcription pour octuor de la célèbre Vocalise de Rachmaninov

    je ne vous dirai jamais assez que la musique est toujours plus belle à partager, venez nombreux,amenez vos amis, et à la sortie partagez avec les musiciens le verre de l'amitié

    profitez des tarifs compétitifs, comme l'abonnement "liberté" qui s'applique aussi aux groupes et la gratuité pour les jeunes élèves des écoles de musique

    réservations : lesamischambreapart@orange.fr ou +33 607 626 125

    vous pouvez voir toute la saison 2011-2012 ici : saison 2011-2012

    Ambre Chapart


    Graciane Finzi.jpgGraciane Finzi est née dans une famille de musiciens.
    Après des études au conservatoire de Casablanca, sa ville natale, Graciane Finzi entre au Conservatoire National Supérieur de Paris ou elle obtient de nombreux prix dont ceux d’harmonie, contrepoint, fugue et composition. En 1979 elle est nommée professeur au CNSM de Paris. En 1982 elle obtient le Grand Prix de la Promotion Symphonique de la Sacem, en 1989 le Prix Georges Enesco et son opéra “Pauvre Assassin” est couronné du Prix de la SACD en 1992. En 2001 elle se voit décerner le Grand Prix de la SACEM pour l’ensemble de son œuvre et en 2006 l’Institut de France lui attribue le Prix Chartier. Elle a été en résidence à l’Orchestre National de Lille de 2001 à 2003.
    Le répertoire de Graciane Finzi se compose d’une centaine d’œuvres, dont sept opéras, qui ont été jouées dans le monde entier par de grands solistes et orchestres.
    Graciane Finzi utilise les instruments, qu’il s’agisse de masses orchestrales ou de solistes, en tenant compte de leur individualité, puis les unit par groupes juxtaposés dont chacun possède son propre dynamisme, ses pulsions, sa couleur, son rythme de vie, multipliant ainsi les parties réelles. La multiplicité des couches sonores va s’organiser pour former des harmonies géantes et des couleurs insoupçonnées.
    Dans un langage moderne qui utilise des progressions harmoniques et chromatiques hors de la tonalité, elle établit des pôles d'attraction entre les notes; cela guide à la compréhension d’une musique jamais abstraite mais visant l’expression immédiate de la vie et des sentiments profonds de l’homme.
    Créé le 16 Juin 1975 au Festival de Lyon, par le Trio de Lyon, le Trio pour piano et cordes est composé d'un ensemble de cinq petites pièces que l’auteur décrit ainsi :
    1) Un seul élément est partagé entre le violon, le violoncelle et le piano. Cette phrase musicale de quelques notes vit grâce aux différentes attaques sonores ici employées (pizzicato, pizzicato vibré, arco avec ou sans vibrato, attaques différentes d'un même son, etc....)
    2) Juxtaposition des trois instruments à des temps différents.
    3) Juxtaposition d'éléments différents. Chaque instrument a sa propre vie et est indépendant par rapport aux autres.
    4) Recherche d'une certaine atmosphère sonore. Elle s'enchaîne au
    5) qui ne se justifie pas autrement que par 1’envie que j’ai eue d’entendre cette valse à la fin de ce trio.

      La production de musique de chambre compte vingt-quatre numéros d’opus au catalogue de Johannes Brahms.jpgBrahms et occupe donc une place à peu près comparable à celle de la musique pour piano, avec le même caractère de confidence, et parfois de confession, mais manifestant un souci de la forme beaucoup plus exigeant et parfaitement “classique”. La première moitié de la vie du compositeur (jusqu’à la trentaine) est assez pauvre en ce domaine, puisque la plupart des partitions resteront inachevées ou ne seront pas publiées. Par contre, à partir du Quintette avec piano, daté de 1864, les œuvres de chambre se répartiront avec une certaine régularité. Brahms n’abordera le quatuor à cordes qu’au moment de la maturité : genre difficile certes, mais surtout occulté par Beethoven, modèle aussi exemplaire qu’intimidant (même phénomène, notons-le, dans le domaine de la symphonie). Brahms conservera sa vie durant un goût des formations instrumentales assez inusitées (du moins à l’époque) : ainsi des quatuors avec piano, des sextuors à cordes, d’un trio avec cor, ou des tardives sonates pour clarinette et piano.
    Sur le plan formel, Brahms, hanté par le besoin de discipline et d’équilibre des schémas classiques n’apporte aucune innovation particulière. La forme sonate et les techniques de la variation sont exploitées dans un cadre beethovénien, néanmoins avec une grande richesse d’invention et, surtout, une souplesse d’écriture reflétant un sens inné de la mélodie et très concertante, s’alliant à l’exercice permanent d’une science du contrepoint et de la polyphonie. Ainsi a-t-on souvent discerné chez Brahms - et la musique de chambre en porte remarquablement témoignage - d’exceptionnelles facultés de synthèse : du classicisme et du romantisme, ainsi qu’une conciliation du formalisme, de l’expression des sentiments et d’une certaine liberté de l’esthétique.
    Pour citer Claude Rostand “Dans ce domaine de la musique de chambre, Brahms, le premier après Beethoven, a trouvé un équilibre particulier entre l’inspiration et la science. Après lui, en son siècle, il a été imité, mais il ne semble pas abusif de dire qu’il n’a pas été égalé ..”
    Œuvre de jeunesse - la première de musique de chambre dans la production brahmsienne – le Trio pour piano et cordes op.8 fut esquissé vers la fin de 1853 et composé à Hanovre dans les premiers mois de 1854. Ce sont là les années de “Sturm und Drang” du musicien (alors âgé de vingt-et-un ans), - celles marquées notamment par l’amitié avec Robert Schumann (dont l’état de santé s’altère alors considérablement, et qui mourra en 1856). La partition qui se joue aujourd’hui est une version remaniée par le compositeur bien plus tard, en 1891, sur le conseil de Hanslick; comme Brahms l’expliqua lui-même à son vieil ami Grimm, il “ne lui mit pas une perruque, mais se contenta de peigner et d’arranger un peu les cheveux” ... Ce qui est quelque peu travestir la   réalité : l’exemplaire utilisé pour cette révision a été conservé, et permet de constater que, loin de s’en tenir à des retouches de détail, le compositeur a parfois réécrit des sections complètes, remplacé des thèmes et modifié des développements entiers. Ainsi transformée, pleinement maîtrisée, certainement mieux équilibrée, l’œuvre a néanmoins conservé certaine ardeur juvénile et cette imprégnation de poésie fantastique caractérisant le Brahms hambourgeois beaucoup plus que le viennois. Il semble, malgré tout, que les maladresses de jeunesse, une profusion thématique un peu brouillonne possédaient un charme naturel qui s’est partiellement estompé, - et que certains amis du musicien lui reprochèrent d’avoir perdu. La première audition publique (version primitive) eut lieu - curieusement à New York, au Dodsworth's Hall, le 27 novembre 1855; l’œuvre ne fut créée en Europe, à Breslau, que le 18 décembre suivant.
    Le mouvement initial est dans la forme sonate à trois thèmes assortis d’idées secondaires, - d’un assez libre agencement, bien individualisés et largement développés (avec, dans la rédaction originale, une sorte de développement adjacent sous forme de fugato intercalé dans la reprise !). Ce qui frappe d’emblée premier thème de l'exposition, d’une grande beauté mélodique et d'une solide assise rythmique, introduit par le clavier -, c’est l’extrême plénitude, voire la sensualité, du son; c’est une force vitale, également, envahissant et animant les différents registres instrumentaux. Ce premier thème, dès sa présentation, est d’ailleurs varié avec une puissante conviction. Le deuxième thème, plus concis, n’apparaîtra qu’à la mesure 83, et le troisième à la mesure109 seulement, - ce qui peut suffire à démontrer que la générosité de l’inspiration a pris le pas sur le respect des strictes règles classiques. Dans son intégralité, cet Allegro comporte presque cinq cents mesures: un excès d'invention mal contrôlé, certes; mais, aussi, une telle joie de composer!
    Le mouvement suivant est un scherzo dans le ton de si mineur: aérien - une “danse d’elfes” selon maints commentateurs -, il adopte la répartition classique avec trio central (Meno allegro en majeur, à 3/4, de caractère populaire, rythmiquement vigoureux). Il est notable que seul ce mouvement n”a subi que de très infimes retouches : le Brahms de la maturité dut donc s”en trouver encore satisfait.
    Le mouvement lent, en si majeur et dans une forme-lied ternaire - plonge l’auditeur dans un tout autre climat, de mystère quasi religieux, - avèc son premier thème d’une solennité accentuée par un piano aux riches sonorités, et la noblesse, traversée d’élans de ferveur, du second thème mélodique (le violoncelle en instrument soliste). Les oppositions des combinaisons instrumentales révèlent ici un Brahms avant tout soucieux de jouer sur les “éclairages” du sentiment. On revient ensuite au calme solennel du début.
    Quant au finale en si majeur (occasion de souligner l’unité tonale de la partition), il combine habilement les formes rondo et sonate à trois thèmes : course de triolets du thème d’introduction (on remarquera que l’indication de mouvement fut, à l’origine, celle d’Allegro molto agitato), résolue en une puissante affirmation de joie et d’optimisme (dans le ton de ré majeur), - tout en tenant compte du fait que l’ensemble fut copieusement écourté, mais a gagné une homogénéité qu’il ne possédait pas auparavant.

  • Emouvant baroque : le Combat de Tancrède et Clorinde de Monteverdi

    Chers amis mélomanes,

    encore un concert exceptionnel, et je ne trouve plus de superlatif adapté...venez pleurer d'émotion en entendant les chefs d'oeuvres éternels de Monteverdi : le lamento d'Arianna et le Combat de Tancrède et Clorinde

    Chambre à part en partenariat avec la Chapelle des Flandres vous propose un concert baroque somptueux,

    le dimanche 6 novembre à 11h au Conservatoire de Lille (place du concert), programme détaillé ci-dessous

    venez nombreux et amenez vos amis, ils pourraient vous reprocher de ne pas leur avoir dit...

    comme d'habitude on pourra partager nos émotions avec les musiciens autour d'un verre à la sortie

    réservations : lesamischambreapart@orange.fr ou +33 607 626 125

    vous pouvez voir toute la saison 2011-2012 ici : saison 2011-2012

    et notez les prochains rendez-vous, le 20 novembre à 11h au Conservatoire, le trio Una Corda dans Brahms et Finzi, le 27 novembre après midi au Palais des Beaux-Arts, "les beaux Serges", 2 concerts autour des quatuors de Prokoviev et Rachmaninov, par le quatuor Kryptos et les musiciens de l'ONL.

    Ambre Chapart

     

    Claudio Monteverdi Lamento d’Arianna

    Gian Francesco Malipiero   Quatuor à cordes no 3 “Cantàri alla Madrigalesca”

    Ildebrando Pizzetti  3 Canzoni pour soprano et quatuor

    Claudio Monteverdi Il Combattimento di Tancredi e Clorinda
        
    Les chanteurs de l'ensemble Biscantor :
       Clorinda : Juliette de Massy  
       Tancredi : Clément Debieuvre  
       Testo : Emmanuel Hasler  

    Ken Sugita  violon   Paul Mayes violon  Christelle Hammache  alto  Catherine Martin  violoncelle   Bérengère Schlepper  contrebasse  François Grenier  clavecin   Olivier Labé  théorbe

    Clavecin fourni par  Atelier David Boinnard facteur de clavecins, 82 rue de Bouvines, 59790 Ronchin  03 29 70 76 27

     

    Commandée à Claudio Monteverdi par le prince Vincenzo Ier de Mantoue, la composition et la Monteverdi.jpgcréation de l’Arianna, sur un poème d’Ottavio Rinuccini, s’accompagnèrent de circonstances tragiques : le 10 septembre 1607, Claudia, l’épouse du compositeur, meurt, laissant Monteverdi avec deux jeunes enfants. L’œuvre est composée rapidement, durant l’hiver 1607-8, en trois mois tout au plus. S’engagent alors cinq mois de répétitions, intérrompus le 9 mars 1608 par la mort brutale de la chanteuse principle, Caterina Martinelli (la Romanina), jeune prodige âgée de 18 ans, plongeant les préparatifs dans une « grandissima confusione ». La remplaçante trouvée d’urgence, Virginia Ramponi, dite la Florinda, fit pourtant merveille dans le rôle, apprenant sa partie parfaitement par cœur en six jours, et la chanta « avec tant de grâce et de sentiment que tous ceux qui l’entendirent s’en émerveillèrent » (Antonia Costantini).
    L’opéra fut créé à Mantoue, le 28 mai 1608 : « La représentation de cette fable a duré deux heures et demie. L’opéra en lui-même fut très beau (…) et tout fut interprété par des chanteurs et des chanteuses plus qu’excellents. Le Lamento que chante Arianna sur son rocher, quand elle a été abandonnée par Teseo, fut particulièrement merveilleux et joué avec tant de sentiment et de compassion qu’il ne s’est trouvé aucun auditeur pour n’être alors apitoyé, ni aucune dame qui n’ait versé quelques larmes à cette plainte » (Federico Follino).
    L’œuvre fut rejouée à plusieurs reprises mais ne fut pas imprimée, et la partition originale disparut dans l’incendie de la bibliothèque ducale lors de la guerre de succession ouverte à la mort du duc Vincenzo II en 1627. Seule la scène centrale, connue sous le nom de Lamento, extrait de la 6e scène de cet opéra qui en comportait huit, est conservé par trois versions. Le monologue dramatique, qui se présente comme un récit continu à 2 voix (chant et basse chiffrée), a été préservé par deux éditions pirates parues simultanément en 1623. Ces éditions ne comportent pas les répliques du chœur (connues par le texte de Rinuccini, qui a survécu) qui séparaient les 5 sections de la scène, la commentant comme dans une tragédie grecque. L’accompagnement se présente comme une simple basse, sobrement chiffrée, alors que plusieurs témoignages évoquent clairement la présence de nombreux instruments. Monteverdi lui-même en a repris et réélaboré par deux fois la musique : à cinq voix en 1614 dans le VIe Livre de Madrigaux, et en version monodique sacrée en 1640 dans la Selva morale e spirituale.

    La première représentation d’Il combattimento di Tancredi e Clorinda (Le combat de Tancrède et de Clorinde) eut lieu lors du carnaval de Venise de 1624 chez le sénateur Girolamo Moceningo, protecteur du musicien. Reprenant un extrait de La Jérusalem délivrée du poète Le Tasse, il est inclus secondairement dans son huitième et dernier livre de madrigaux, dit Madrigali guerrieri e amorosi (madrigaux guerriers et amoureux) publié en 1638.
    L’orchestre est réduit à un clavecin, quatre violas da brazzo (soprano-alto-ténor et basse) et une contrebasse de gambe. Le narrateur (Testo) raconte le combat de Tancrède, preux chevalier, contre Clorinde, une belle musulmane dont il est amoureux, déguisée en soldat. Tancrède, après un duel acharné, la transperce de son épée. Son dernier souffle exprime sa nouvelle foi au dieu chrétien et elle pardonne à son agresseur. Il la reconnaît, devient ivre de douleur. Elle expire, apaisée.
    L’aspect dramatique et théâtral du madrigal est une relative nouveauté, renforcée par les indications scéniques du musicien, l’alternance de périodes tranquilles (molli) et agitées (concitati), les suggestions musicales du fracas des armes. Monteverdi précise dans son introduction que l’œuvre devra être précédée d’un madrigal sans geste et que le début du combattimento doit être inattendu, les protagonistes - dont il détaille des éléments de costume - devant arriver à l’improviste. Le Testo est présent dans la presque totalité de l’œuvre, les rôles de Tancrède et Clorinde étant réduits à quelques répliques seulement.

    Malipiero.jpgGian Francesco Malipiero est né à Venise dans une famille aristocratique et musicienne. Il poursuit ses études musicales au Conservatoire de Bologne, et c’est là qu’il découvre dans la Bibliothèque Marciana des pages oubliées de Monteverdi, Frescobaldi et tout un ensemble de partitions qui vont non seulement engendrer une activité musicologique intense mais enrichir sa formation et influencer son esthétique. Malipiero gagne Paris en 1913 : il est fortement impressionné à la création du Sacre du Printemps de Stravinski, et découvre également Debussy et Ravel. Mais la guerre l’oblige à regagner l’Italie et il vivra à Asolo, près de Venise, jusqu’à la fin de sa vie. Outre son activité prolifique de compositeur (y compris une trentaine d’opéras et 14 symphonies) et son poste de professeur de composition au Liceo Musicale Benedetto Marcello de Venise, Malipiero dirige une édition de l’œuvre complète de Monteverdi en 16 volumes entre 1926 et 1942, ainsi que des éditions de la musique de Vivaldi, Galuppi, Lotti et Marcello.
    Avec Respighi, Pizzetti, et Casella, Malipiero a initié, au début du 20ème siècle, un retour à la musique instrumentale italienne. Dénonçant l’omniprésence et l’usure du mélodrame vériste, il cherchait son inspiration dans l’âge d’or de la musique italienne du 17ème 18ème siècles, perverti à son idée pendant le siècle suivant au profit d’un opéra aux ficelles un peu trop voyantes, “avec ses décors de papiers peints, parenthèse éphémère qui ne pourra jamais entraver la renaissance musicale d’un pays qui a un passé glorieux” (Malipiero). A la volonté de Debussy et du Groupe des Six de se libérer de l’emprise wagnérienne répond celle de cette génération de musiciens italiens pour s’affranchir de Verdi et du vérisme. Malipiero évoquant sa jeunesse affirmait avoir eu “le sentiment de vivre dans un désert musical”.
    Il s’imprégnait alors d’autres courants découvert à l’étranger, puisant aussi bien dans des racines profondes du passé que dans la musique populaire traditionnelle : c’est l’époque du néo-classicisme auquel se rallient justement aussi bien Debussy (Rameau), Ravel (Couperin), Stravinski (Pergolèse) que Busoni (Bach), ainsi que du nationalisme de Bartók, Kodaly et Vaughan Williams.
    Malipiero admirait profondément Debussy (“Debussy, c’était Dieu!” s’exclamait-il), mais dès la préface de son premier Quatuor à cordes, Malipiero déclare vouloir s’affranchir du style “d’une forme de composition musicale qui dès sa naissance fut classique, tandis que les ressources sonores dont disposent les instruments qui forment un quatuor à cordes sont infinies et peuvent très bien permettre de s'échapper de l’atmosphère de la musique de chambre pour respirer l’air libre des rues et de la campagne.”
    De ce fait, Malipiero casse le moule de la structure classique. Il écarte la forme sonate au profit d’une écriture quasi improvisée, refuse toute idée de développement, rejette l’alternance des quatre mouvements traditionnels pour ne s’en tenir qu’à un seul. “Malipiero” remarque Harry Halbreich, “fut un indépendant, très vite sorti du post-romantisme, ne s’attardant pas davantage dans l’impressionnisme, et pourtant conservant de la grande leçon de Debussy le goût de la liberté poussé jusqu’à la fantaisie, de la clarté et de la concision, enfin d’une harmonie savoureuse et raffinée allant se régénérer aux sources modales, tant du chant grégorien que de la musique de la Renaissance. Longtemps fidèle à un diatonisme modal d’ailleurs non dépourvu de dissonances parfois assez rudes, le langage musical de Malipiero, toujours axé sur un contrepoint mélodique aussi souple que riche d’imprévus, s’enrichit sur le tard, à partir de 1954 environ, de matériaux nettement plus chromatiques, allant jusqu’à l’utilisation (mais sans esprit de système) de structures dodécaphoniques.”
    Le 3ème Quatuor à cordes, Cantàri alla Madrigalesca (écrit en1931), se garde bien de tout développement thématique dans un mouvement unique où alternent très librement tempi lents et tempi rapides. “Les Cantàri alla Madrigalesca”, précise Malipiero, “ne sont autres que la sonorité des instruments à cordes qui chantent: ils chantent en jouant, et le caractère madrigalesque résulte spontanément de leur expression.”
     
    Fils d’un professeur de piano, Ildebrando Pizzetti a suivi sa formation musicale au conservatoire de Pizzetti.jpgParmes et entreprend une étude de la musique italienne des XVème et XVIème siècles avec Giovanni Tebaldini. Il rencontre l’écrivain Gabriele D’Annunzio en 1905 et s’est fait connaître par la musique de La Nave (le bateau, écrit par ce dernier), dont la première exécution eut lieu à Rome en 1908. La même année Pizzetti a obtenu le poste d’enseignement d'harmonie et contrepoint au conservatoire de Florence, qu’il a dirigé de 1917 à 1923. Après avoir composé la musique pour le drame La Pisanella d’après Gabriele D’Annunzio, la Messe de Requiem et d'autres compositions importantes, il est devenu directeur du conservatoire de Milan en 1924, poste qu’il a laissé en 1936 pour prendre la position de professeur de composition de l’Académie nationale de Sainte-Cécile à Rome. En 1939 Pizzetti a été nommé Académicien d’Italie et en 1949 il a pris la direction de l’Académie nationale de Sainte-Cécile.
    Sa quête d’un renouveau de l’opéra italien, basé sur l’idée d’un équilibre absolu entre les mots et la musique, l’amenait à développer un arioso souple, d’après Wagner, Debussy et Moussorgsky, tout en rappelant la monodie florentine. Ses principales réussites dans ce genre étaient ses deux premiers opéras, Fedra and Debora e Jael (1915 et 1922) et, surtout, la tragédie Assassinio nella cattedrale (Meurtre dans la cathédrale) d’après T.S. Eliot, de 1958. Pizzetti fut aussi directeur de la section Musique de la Enciclopedia Italiana (1925-37). Très respecté et influent dans son pays comme compositeur, chef d’orchestre et critique musical, son style est néanmoins resté conservateur, même s’il s’est associé un temps avec Alfredo Casella, représentant de la nouvelle musique italienne. Avec Respighi et d’autres, il a même signé un manifeste notoire du 17 décembre 1932 dans lequel il attaquait les tendances progressistes de l’époque en recommendant un retour aux valeurs traditionnelles.
    En 1926 Pizzetti choisit donc la poésie populaire italienne pour les Tre Canti, des textes plutôt compliqués, narratifs, et à l’opposé de la poésie conventionnelle. Pizetti choisit en outre une solution courageusement innovante pour les mettre en musique : d’abord il choisit le quatuor à cordes en accompagnement (Respighi avait déjà adopté cette formule en 1914 pour Il Tramonto, sur un texte de Shelley, ainsi que Vaughan Williams en 1908 dans On Wenlock Edge), puis son traitement musical des textes tend vers le dramatique. Ce côté théâtral est évident dans Donna lombarda où des personnages sont en interaction autour d’un narrateur et encore dans La prigioniera, où le premier Andante mosso berçant est interrompu par une danse exubérante sur les paroles “Suona violino, che voglio balà!” (Joue violon, je veux danser !), ainsi que dans le descriptivisme de La pesca dell’anello qui clôt le cycle.

    Paul Mayes.

  • Le célèbre Concert de Chausson

    Chers amis mélomanes,

    Dimanche 9 octobre à 11h au Conservatoire de Lille un concert exceptionnel - encore !

    Le célèbre Concert de Chausson opus 21, un sextuor avec piano et violon solo. Vous pourrez entendre Stephen Bryant, violon solo de l'Orchestre de la BBC qui nous fait l'honneur de sa présence. Avant d'entendre ce chef d'oeuvre, nous ferons un rapide tour d'Europe avec Vaughan Williams et Turina. Ci-dessous le programme complet du concert vous présenté par Paul Mayes.

    La présentation détaillée et l'intégralité des programmes de la saison 2011-2012 sont ici : saison 2011-2012

    N'oubliez pas de laisser vos coordonnées postale et mail si vous voulez être averti des programmes de musique. Profitez des facilités d'abonnement Liberté : 6 concerts à libre choix pour 48€

    Réservez vos places à l'adresse suivante : lesamischambreapart@orange.fr ou au 0607 626 125

    Amenez vos amis et connaissances aux concerts. La musique de chambre est l'événement musical incontournable du dimanche à Lille.

    Nous vous y attendons

    notez dès à present sur vos agendas le concert du 6 novembre- toujours exceptionnel - avec le Combat de Tancrède et Clorinde de Monteverdi, avec la participation des chanteurs de l'ensemble Biscantor. Un concert en partenariat evac La Chapelle des Flandres.

    Ambre Chapart

    Programme du 9 octobre à 11h

    Joaquin Turina  Scène andalouse, op.7 pour alto solo, piano et quatuor à cordes
    1. Crépuscule du soir  2. À la fenêtre


    Ralph Vaughan Williams  Scherzo pour quintette à cordes

    Ernest Chausson Concert, op.21 pour piano, violon et quatuor à cordes
    1. Décidé 2. Sicilienne  3. Grave  4. Très animé


    Paulina Pollet  piano
    Stephen Bryant   violon
    Ken Sugita  violon
    Cristina Blanco-Amavisca  alto
    Paul Mayes   violon/alto
    Jean-Michel Moulin  violoncelle

    Turina.jpg  Né à Séville, Joaquín Turina reçoit en cadeau à l’âge de quatre ans un accordéon et apprend à jouer avec une vitesse et une facilité qui surprend tout son entourage. Après des études à Séville puis à Madrid, il part à Paris en 1905 afin de suivre des cours de composition avec Vincent d’Indy à la Schola cantorum. Pendant ces années parisiennes, il développe de solides amitiés, parmi lesquelles De Falla, Albeniz, Fauré et Dukas, et connaît ses premiers succès en tant que compositeur. De retour à Madrid en 1914, il y passera le reste de sa vie. Outre la composition, il est directeur d’orchestre au théâtre Real (notamment pour l’orchestre des Ballets russes), professeur et directeur du conservatoire de Madrid, pianiste, critique musical et commissaire général de la musique.
    Poussé par Albeniz, Joaquín Turina développe dès ses débuts un style andalou flamenco au langage très sensible et personnel, dans le même temps que Bartok, Enesco et Vaughan Williams s’intéressaient aux musiques populaires de leurs pays et à l’inclusion de ce  « folklore » dans la musique écrite.
    Un rapport très élaboré au pictural (son père était peintre), aux images évocatrices et au rêve, rend la musique de Joaquín Turina d’une plasticité presque palpable.
    La Scène andalouse opus 7 pour alto solo, quatuor à cordes et piano (1912) reflète l’évolution du style de Turina durant ses années à Paris, et l’intégration des éléments programmatiques dans cet “andalucismo universalizado”. De par sa forme, la Scène andalouse est une sérénade en deux mouvements où l’alto solo joue le rôle de l’amant andalou. Le premier mouvement intitulé “Crépuscule du soir”, s’ouvre avec un solo de piano qui lui confère une atmosphère particulière, avant que l’alto solo le rejoigne, puis le quatuor à cordes déploie un doux tapis de sons sous cette exposition. Suit une seconde phase intitulée “Serenata”, où l’instrument soliste est mis en valeur. Une troisième phase de ce premier mouvement se présente comme une danse : “Mouvement de Habanera”. Le deuxième mouvement porte le titre “À la fenêtre” et représente un dialogue entre amants. Ses tempi révèlent différents états d’âme - la phase andantino du quintette laisse place à l’Allegro moderato de l’instrument soliste - sous une forme illustratrice, mais jamais caricaturale.
     
    Artisan principal du renouveau de la musique anglaise au XXe siècle, Ralph Vaughan Williams, fils de Vaughan Williams.jpgpasteur et petit-neveu de Charles Darwin, étudia d’abord au Royal College of Music (avec Parry et Stanford) où il noua une profonde amitié avec Gustav Holst, puis à Cambridge. Il se rendit ensuite pour quelques mois à Berlin, où il travailla avec Max Bruch puis, en 1909 lors d’un voyage en France, il rencontre Maurice Ravel, qui exerça une profonde influence sur son écriture. Professeur de composition au Royal College of Music de 1919 à 1938, il mena également une activité de direction d’orchestre.
    En collaboration avec son ami Cecil Sharp, il réunit plus de 800 chansons populaires de son pays, qu’il étudia et traita à la manière de Bartók et de Kodály en Hongrie, tout en manifestant également un grand intérêt pour la musique élisabéthaine et jacobéenne des XVIe et XVIIe siècles.
    Bien que considéré comme un des plus grands symphonistes du XXe  siècle, la création musicale n’a jamais été un processus facile pour Vaughan Williams. Chaque composition lui demandait un effort considérable, plus au moins couronné de succès, mais jamais il n’abandonna la lutte ni n’accepta le moindre compromis. Il parvint à maturité relativement tard, mais composa jusqu'à son dernier souffle, abordant à peu près tous les genres, des plus modestes aux plus ambitieux.
    Le Scherzo pour quintette à cordes date de 1906 et fait partie d’un nombre considérable d’œuvres de jeunesse retirées par le compositeur de son corpus, qui n’ont que récemment retrouvé leur place méritée dans les salles de concert et sur disque.
     
    Chausson.jpg  Issu d’une famille bourgeoise, Ernest Chausson fit des études de droit et devint avocat avant d’aborder le domaine musical. Il étudia alors dans la classe de Jules Massenet au Conservatoire de Paris, puis auprès de César Franck. Il fit par la suite des voyages en Allemagne pour écouter notamment Richard Wagner à Bayreuth, où il assista à la création de Parsifal. En 1886, il devint secrétaire de la Société nationale de musique et reçut chez lui nombre d’artistes majeurs de son temps, notamment Paul Dukas et Claude Debussy, avec qui il se lia d’amitié. Il mourut à 44 ans d’un accident de vélo, laissant son Quatuor à cordes inachevé. Son œuvre, relativement modeste en quantité (39 opus), est influencée par ses deux maîtres : César Franck et Richard Wagner.
    L’élaboration du Concert a couvert deux années de la carrière de Chausson. Le troisième mouvement fut achevé le premier en mai 1889; puis la Sicilienne suivit en 1890; enfin le mouvement initial et le finale furent terminés entre le 25 juin et le 8 juillet 1891. C’est le public bruxellois qui eut la primeur de l’œuvre: l’association des XX, fondée huit ans auparavant par Octave Maus, défenseur de la « jeune génération », la fit entendre avec grand succès le 4 mars 1892. Elle fut créée quelques semaines plus tard à Paris, dans le cadre des concerts de la Société Nationale de Musique, et rejouée ultérieurement par Eugène Ysaye, son dédicataire. Dans une lettre adressée au grand violoniste belge, Chausson devait préciser : « Je ne vous cache pas d’ailleurs que c’est en pensant à vous ... , et à l’impeccable exécution que je pouvais espérer, que j’ai écrit ce Concert. Il vous appartient donc un peu puisque, sans vous, il est à peu près certain que je ne l’eusse pas écrit.» En 1888, le critique musical Pierre Lalo considéra le Concert en ré majeur de Chausson comme « l’une des œuvres les plus considérables et les plus intéressantes qu’on ait écrites en ces dernières années pour la musique de chambre ».
    On s’est souvent interrogé sur la formation inhabituelle - piano, violon, quatuor - retenue par Chausson : par sa disposition instrumentale, l’œuvre s’apparente - si l’on veut - au « concert » français tel que le conçut François Couperin au milieu du XVIIIe siècle ; mais, par son architecture, elle voisine avec le Quintette pour piano et cordes composé quelque dix ans auparavant par Franck. En définitive, Chausson réussit une union étroite et parfaite entre le système harmonique de son maître et l’univers rythmique allégé de Fauré, - et l’on assiste à l’implication d’un monde fauréen dans un monde franckiste.
    Dès l’introduction du premier mouvement indiqué Décidé, le Concert obéit, comme le Trio pour piano et cordes op. 3, à la forme cyclique. Les trois grands accords initiaux feront figure de cellule cyclique. Pleine d’agitation intérieure, cette introduction plonge l’auditeur dans le climat sombre et angoissé qui dominera presque tout le morceau.