Chers amis mélomanes,
Un grand concert le dimanche 6 mai à 16h à l'Auditorium du Palais des Beaux-Arts de Lille
Mozart dans le superbe Divertimento pour trio à cordes K563, et la poursuite de la célébration du centenaire de Jean Françaix avec son trio à cordeset un quatuor avec cor anglais (de la famille du hautbois)
Jean Françaix
Trio à cordes
Quatuor pour cor anglais et trio à cordes
Wolfgang Amadeus Mozart
Divertimento pour trio à cordes, en mi bémol majeur K.563
Philippe Gérard cor anglais
Marie Lesage violon
Cristina Blanco-Amavisca alto
Jean-Michel Moulin violoncelle
tarif 12€ le concert, tarif réduit 6€ pour les demandeurs d'emploi et 12-25 ans
réservations : lesamischambreapart@orange.fr ou +33 607 626 125
billetterie au sous-sol directement à l'entrée de l'auditorium
nous vous attendons nombreux pour cet interlude musical du 6 mai
Ambre Chapart
Jean Françaix est né en 1912 au Mans. Il bénéficie de l’enseignement parental pour ses premiers pas musicaux, guidé par un père professeur de piano, directeur du Conservatoire du Mans et une mère chef de chœur. Ses parents participent activement à la vie musicale sarthoise : ils animent notamment la direction de la Société des concerts et du cercle choral féminin, ce qui n’est pas sans intérêt pour un compositeur en herbe. Aux premières loges musicales, il assiste, puis participe aux répétitions pour finalement tester aussi son répertoire naissant.
Les premiers succès ne tardèrent pas. Quelques années après avoir intégré le Conservatoire de Paris dans la classe d’Isidore Philipp, il ressort nanti d’un premier prix de piano (1930). Pris en main par Nadia Boulanger dès 1923, il se voit propulser une dizaine d’années plus tard sur les scènes internationales, notamment à Vienne en 1932 avec ses Huit bagatelles pour quatuor à cordes et piano, interprétées par le quatuor Kolisch et lui-même.
Appartenant à la génération du groupe “Jeune France”, sa musique est néoclassique, légère et élégante, brillante et pleine de charme. Elle s’inscrit dans la même tradition que celle de Sauguet, d’Ibert et des premières œuvres du “groupe des Six”, avec une vivacité et une ironie qui en font un reflet typique de “l’esprit français” hors de nos frontières. Longtemps négligée par les instrumentistes français, cette musique “pour faire plaisir” a connu un regain de faveur généralisé grâce aµx musiciens anglo-saxons et allemands qui l’ont toujours appréciée à sa juste valeur, celle d’un divertissement élégant et raffiné. Il faut ajouter que Jean Françaix a toujours travaillé en étroite collaboration avec les musiciens qui lui commandaient des œuvres ; l’écriture qui en résulte est admirablement adaptée aux possibilités des instrumentistes, souvent difficile et toujours gratifiante.
Œuvre juvénile, le Trio à cordes de 1933 est dédié au célèbre Trio Pasquier, qui l’interpréta longtemps devant des publics ravis. D’une inspiration enjouée, primesautière, il est en quatre mouvements dont les deux extrêmes (Allegretto vivo et Rondo), rythmiques et dansants, s’opposent aux mouvements centraux, un Scherzo plus subtil en ses jeux harmoniques et ses effets de pizzicato virtuoses, et, plus particulièrement, un Andante d’une atmosphère tendre et transparente, avec les trois instruments con sordino.
Le Quatuor pour cor anglais et cordes, écrit presque quarante ans plus tard en 1971 et dédié à la hautboïste anglaise Janet Craxton, s’inscrit dans la dernière période créatrice du compositeur. Si la sonorité remarquable du cor anglais est mis à l’honneur, chaque instrument est néanmoins parfaitement intégré dans ce quatuor.
C’est un véritable petit ragtime auquel les cordes nous convient dès les trois premières mesures d’introduction. Un ample thème, dont la mélodie aux accents rythmiques déplacés se passe d’un instrument à l’autre, se déploie pendant tout ce premier mouvement.
Le contraste sera avec l’Andante tranquillo qui suit est du plus grand. Le compositeur joue sur les possibilités d’expression mélancolique du cor anglais, avec les cordes jouant en harmoniques et en notes tenues, ponctuées par des accords arpégées.
Le Vivo assai, avec des passages mélodiquement et harmoniquement très colorés, offre les “sorties de route” habituelles d’un compositeur tellement rompu à la tonalité qu’il se libère très rapidement de celle annoncée (sol majeur). Le thème très caractéristique en mineur de l’Andantino, harmoniquement soutenu, se pose en transition entre les deux mouvements rapides tandis que le rythme balançant de l’Allegro giocoso final donne un jeu étoffé, une trame tissée serrée qui apporte une épaisseur auditive à ce quatuor.
Le Divertimento pour trio à cordes en mi bémol majeur K.563 de Wolfgang Amadeus Mozart fut composé à Vienne et porte la date du 27 septembre 1788. Elle est dédiée au négociant viennois Michael Puchberg en remerciement des prêts qu’il voulait bien consentir à Mozart, même s’ils étaient loin de correspondre aux demandes et aux besoins du compositeur dont les conditions d’existence devenaient au fil des ans de plus en plus dramatiques. Mozart connut entre juin et octobre 1788 une période de composition très féconde et ce divertimento fut écrit peu après les trois dernières symphonies, et au milieu de la composition de trois trios avec piano, qui ont été égaiement dédiés à Puchberg. Le choix du divertimento comme genre musical pour ce trio à cordes s’explique par le fait que l’œuvre est avant tout destinée au simple agrément de celui qui est encore le bienfaiteur de Mozart. Mais ce dernier a sans doute voulu aussi compenser l’aspect galant et mondain de ce genre proche des sérénades et des cassations par le choix d’une formation de chambre, garantie d’un certain sérieux.
Mozart semble avoir commencé par écrire un trio en sol majeur qu’il délaissa rapidement pour entreprendre ce divertimento, en mi bémol majeur cette fois. Dans la mesure où Puchberg était le frère de loge de Mozart, on a coutume d’expliquer ce nouveau choix par le symbolisme maçonnique dont est investi le chiffre trois, correspondant au nombre d’altérations que comporte la tonalité de mi bémol majeur. Si l’on souhaitait poursuivre cette interprétation, on pourrait supposer que le nombre d’instruments choisi participerait aussi bien de la même signification, et remarquer en outre que c’est essentiellement de trios dont Puchberg est le dédicataire.
Ce divertimento, en six mouvements (di sei pezzi), est une des œuvres les plus longues de la musique de chambre de Mozart, mais elle s’élève au rang des chefs-d’œuvre plus par la qualité de son écriture interne que par ses dimensions externes. Mozart parvient en effet à égaler ici les possibilités d’un quatuor tout en restant dans les limites imposées par le trio, et surtout sans abuser des procédés d’écriture lui permettant d’étoffer l’harmonie. Parmi ces procédés, il y a l’usage de doubles cordes permettant d’obtenir plus de trois sons, mais Mozart en use avec parcimonie, et les diverses figures d’arpèges permettant d’égrener successivement toutes les notes de l’harmonie, procédé qu’il préfère, mais dont il n’abuse pas non plus. Car, plus que d’avoir hissé ce genre à la dimension d’un quatuor, voire d’un quintette, c’est la réussite dans la mise des trois solistes sur un même pied d’égalité qui fait la richesse et l’intérêt de cette œuvre. Mozart s’est arrangé pour confier alternativement, ou même simultanément, un intérêt mélodique, voire tout a fait thématique, à chacun des instruments ; le raffinement suprême consiste à aboutir, en quelques endroits bien choisis, à un contrepoint très élaboré, mais toujours gracieux, leur permettant de dialoguer en utilisant les mêmes éléments.