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Quatuors à cordes

Chers amis mélomanes,

En ce dimanche de printemps Chambre à part retourne au palais des Beaux-Arts de Lille avec de superbes quatuors à cordes. Les deux merveilleux Razumowski (opus 59 2 et 3) de Beethoven, et les deux quatuors d'Arenski, compositeur russe du XXe. Deux beaux concerts mêlant chefs d'oeuvres et découvertes.

Auditorium du Palais des Beaux-Arts de Lille, dimanche 15 avril à 15h et 17h.

à 15h
Anton Arenski Quatuor à cordes no1 op.11
Ludwig van Beethoven Quatuor à cordes op.59 no2 “Razumovsky”
Quatuor Dimitri
Céline Planes violon Julie Oddou violon
Renaud Stahl alto Frédéric Dupuis violoncelle

à 17h
Anton Arenski Quatuor no2 pour violon, alto et 2 violoncelles, op.35
Ludwig van Beethoven Quatuor à cordes op.59 no3 “Razumovsky”
Quatuor Rhapsode
Hugues Borsarello violon Paul Mayes violon
Anne Le Chevalier alto Catherine Martin violoncelle
Emilie Stahl violoncelle

venez nombreux, amenez vos amis pour partager vos émotions

tarif 10€ le concert, tarif réduit 6€ pour les demandeurs d'emploi et 12-25 ans

réservations : lesamischambreapart@orange.fr ou +33 607 626 125

vous pouvez voir toute la saison 2011-2012 ici : saison 2011-2012

Ambre Chapart

 

Arenski.jpg Les dons précoces d’Anton Stepanovitch Arenski, né à Novgorod en Russie, furent encouragés par des parents musiciens : le père, médecin, pratiquait le violoncelle; la mère était excellente pianiste et le forma jusqu’à l’âge de neuf ans. Il entre au Conservatoire de Saint-Pétersbourg en 1879 dans les classes de Rimski-Korsakov (composition et orchestration) et de Johannsen (contrepoint et fugue). Une fois diplômé, il est nommé professeur d’harmonie et de contrepoint au Conservatoire de Moscou où il forme des élèves tels que Scriabine, Rachmaninov et Glière. Il mène alors une triple carrière de pianiste, chef d’orchestre et pédagogue. En 1894 il prend la succession de Balakirev, sur recommandation de ce dernier, comme directeur de la Chapelle Impériale à Saint Pétersbourg. Sur ses soixante-quinze partitions complètes et recensées, peu sont restées au répertoire, mais sa musique de chambre s’avère la plus intemporelle par la synthèse originale qu’elle propose entre son invention mélodique russe (influence de Rimski-Korsakov et du Groupe des Cinq) et l’influence de Tchaïkovski, elle-même issue des modèles viennois et italiens.
Les deux quatuors à cordes, bien que d’un style irréprochable, pourraient presque être qualifiés de miniatures. Le premier, op. 11 (qui est aussi la première oeuvre de musique de chambre d’Arenski) comprend un tout petit mouvement lent, un menuet sans prétention mais charmant et un finale écrit en forme de variations sur un petit motif court et agréable tiré d’une mélodie russe. L’instrumentation unique du second quatuor, op.35, avec deux violoncelles à la place des deux violons habituels, renforce le caractère élégiaque de l’oeuvre, dédiée à la mémoire de Tchaïkovski. Arenski inclut des citations de hants funèbres orthodoxes dans le premier et le dernier mouvement ainsi que le célèbre thème du chant traditionnel Slava ! (“Gloire !”) utilisé par Beethoven dans son quatuor op. 59 no 2. Ce quatuor doit sa célébrité surtout aux variations du deuxième mouvement, sur un thème emprunté à l’Album pour enfants de Tchaïkovski, qu’Arenski a également arrangé pour orchestre à cordes.

Ludwig van Beethoven a 36 ans en 1806. Les trois Quatuors à cordes op. 59 furent composés à partir du 26 mai de cette année pour le prince Andreas Razumovsky, ambassadeur du tsar à la cour Beethoven.jpgautrichienne, et terminés au début de 1807. Violoniste fervent et mélomane averti, Razumovsky avait demandé au compositeur d’insérer quelques chansons russes dans ces oeuvres. Dans le texte qui annonçait la publication, on pouvait lire que les “trois nouveaux quatuors de Beethoven étaient très longs et difficiles” et qu’ils “ne sauraient être accessibles à tous, à l’exception éventuelle du troisième, en ut majeur”. Il est vrai que Beethoven a ici brisé toutes les entraves à la technique instrumentale forgées par l’habitude. Rien ne résiste au souffle divin de son imagination, il ne pense certainement pas aux “misérables cordes”, lorsque “lui parle l’esprit !” Sa réponse au fidèle Schuppanzigh, incapable de jouer certains passages, montre que sa nouvelle musique en gestation a besoin d’instrumentistes qui ne craignent ni la modernité ni une poussée soudaine de la virtuosité. Cette transformation radicale d’un genre musical, réservé en principe aux “amateurs”, ne fut guère comprise. Dès la parution des quatuors, on parla de “mauvaise farce d’un toqué” et de “musique inintelligible”. Les Quatuors “Razumovsky” marquent un tournant dans la veine créatrice de Beethoven par le mûrissement de son langage et la sublimation, face au drame personnel de la surdité. Malgré leurs points communs, les trois oeuvres diffèrent sensiblement dans la répartition générale du poids. Le premier en fa majeur est le plus proche des usages classiques habituels, en ce qu’il aborde les questions musicales les plus ardues dès le début, avant de réduire peu à peu la densité de l'argumentation.

Le deuxième en mi mineur, op.59 no 2, maintient un niveau de densité musicale constant tout du long, L’Allegro initial allie un flux en constant changement à une symétrie globale tandis que l’Adagio est particulièrement statique; Beethoven l’aurait conçu, dit-on, en contemplant le ciel étoilé et en pensant à la musique des sphères. Ici le thème russe - le méme que Moussorgski utilisera dans Boris Godounov ainsi qu’Arenski dans son quatuor op.35 – fait son apparition dans la section en mode majeur qui alterne à deux reprises avec le troisième mouvement, Allegretto. L’exubérance de son traitement fugué prépare habilement l’auditeur à la véhémence et à la témérité du finale.

Le quatuor en ut majeur (op.59 no 3) ne constitue pas seulement la brillante conclusion de cette trilogie, mais également la résolution des tensions et des conflits du quatuor précédent. En marge d'une esquisse du finale de ce Quatuor on a trouvé cette note: “De même que tu te jettes ici dans le tourbillon mondain, de même tu peux écrire des oeuvres en dépit de toutes les entraves qu’impose la société. Ne garde plus le secret sur ta surdité, même dans ton art”. Pour la première fois dans les quatuors, Beethoven, comme Mozart dans le quatuor “Dissonances” K.465, commence par une introduction lente, incitant l’auditeur à une attention recueillie; ceci deviendra la règle dans presque tous les derniers quatuors. Après un premier mouvement et un Andante emplis d’ambiguités délibérées et un retour archaïque au style du menuet pour le mouvement de danse, tout le poids et l’impact de la pièce ne reçoivent leur expression directe qu’avec un finale fugué d'une puissance et d’une verve extraordinaires.

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