Cher amis mélomanes,
Dimanche 6 mars à 11h à l'auditorium du Conservatoire de Lille, premier Concert Croisé de la saison, autour de l'alto et de la viole de gambe.
Un programme Bach, dans ses célèbres Brandebourgeois et la cantante "Que ma joie demeure". Des oeuvres indémmodables, des standards diraient le jazzmen. Oui on peut le dire tant les interprétations de ces oeuvres ont varié depuis que des enregistrements existent.
Juliette Danel et Paul Mayes (alto et viole de gambe), avec leurs amis Stéphanie Mouchet, violoncelle, et Kevin Lopata, contrebasse, emméneront une pléiade de jeunes musiciens, pour faire honneur à la musique de Bach.
Vous connaissez maintenant le principe des concerts croisés. les jeunes musiciens, dont certains sont à la porte du professionnalisme, haussent leur jeu pour croiser l'archet avec les pros. Des concerts pleins de promesses toujours tenues. Ne manquez pas ce rendez-vous. Nous vous y attendons nombreux. Et comme d'habitude, nous échangerons nos impressions avec les musiciens après le concert.
Ambre Chapart. lesamischambreapart@orange.fr 06 07 62 61 25
Johann Sebastian BACH
Concerto brandebourgeois no 3 en sol majeur, BWV 1048
Paul Mayes, Louise Vanderlynden, Isabelle Brodka, violons
Juliette Danel, Sarah Maxwell, Frédéric Matte, altos
Stéphanie Mouchet, violoncelle
Kevin Lopata, contrebasse
Chaconne de lé Partita no 2 pour violon seul, BWV 1004
Transcription pour 4 altos par Ichiro Nodaïra
Paul Mayes, Emma Girbal, Violaine Willem, Anissa Amrouche
Concerto brandebourgeois no 6 en si mineur, BWV 1051
Paul Mayes, Thèo Delianne, Gabrielle-Marie Renard, alto I
Amélie Gros, Florence Detrez, Lilian Grosjean-Pascal, alto II
Emma Girbal, Violaine Willem, viole de gambe I
Juliette Danel, Anissa Amrouche, viole de gambe II
Stéphanie Mouchet, violoncelle
Kevin Lopata, contrebasse
Air de la Suite pour orchestre no 3, BWV 1068
“Jésus que ma joie demeure”
Choral de la cantate BWV 147 “Herz und Mund und Tat und Leben”
L’ensemble des participants
Le jeune prince Leopold de Köthen (1694-1728), mélomane et musicien amateur, employait à sa Cour un ensemble de 18 musiciens lorsqu’en 1717 il engagea Johann Sebastian Bach comme maître de chapelle. Bach devait être hautement estimé si l’on en juge par son salaire deux fois supérieur à celui d’un directeur musical habituel. De ses années passées à Cöthen, Bach a laissé quelques unes de ses plus importantes compositions instrumentales, Inventions, Suites françaises, Le Clavier bien tempéré, Sonates et Partitas pour violon seul, Suites pour violoncelle solo, Sonates pour flûte, pour violon et pour viole de gambe et clavecin, Suites pour orchestre, Concertos pour violon et Concertos Brandebourgeois.
En 1719 le margrave de Brandebourg, le prince Christian Ludwig, commanda de la musique au maitre de chapelle de Cöthen mais ce ne fut qu’en 1721 que Bach lui envoya un ensemble de six concertos dans lesquels il avait rassemblé des compositions récentes avec quelques pièces datant de sa période à Weimar (1714-1717) ainsi que des arrangements d’œuvres antérieures, le tout accompagné d’une humble dédicace. Bach, peut-être alors en quête d’un nouvel emploi, s’est-il souvenu avec une pointe d’opportunisme de l’intérêt que le puissant margrave lui avait porté deux ans auparavant, et se rappelle-t-il donc à ses bons souvenirs en lui dédiant le meilleur de son art concertant dans l’espoir d’un poste. Le margrave de Brandebourg, qui ne disposait pas d’un orchestre adéquat pour les jouer, ne fit aucun remerciement et ne parla d’aucun paiement. Le manuscrit ne porte aucune trace d’utilisation.
Selon Philip Pickett*, en présentant cette collection au margrave, Bach pensait lui offrir un « triomphe musical », une « procession » de tableaux allégoriques similaires aux spectacles en vogue à l’époque pour célébrer les importantes affaires d’état. Bach honorait le margrave dans le style d’un héros antique avec un objet de contemplation et d’étude : telle une « vanité », il y incluait de nombreux symboles et métaphores destinés à être interprétés selon les associations traditionnelles, ainsi que par la perception, les connaissances et les raisonnements du destinaire.
Le Concerto no 3 demande trois groupes de cordes (violons, altos et violoncelles) divisés en trois parties ; la forme du premier mouvement est tripartite et la principale figure musicale est formée de trois notes dans un mouvement en tierces. Plutôt qu’une méditation sur la Trinité, ce mouvement représente peut-être une réflexion sur la série spéculative de trois octaves qui représentait pour les théoristes et philosophes du 16e et du 17e siècles les neuf ordres d’anges de l’empyrée, les neuf sphères du ciel éthéré et les neuf régions du monde élémental. Les neuf sphères était liées aux neuf Muses, qui, tels les anges, étaient considéré comme des messagers chargés de transmettre leur mission divine aux artistes. En le comparant aux Muses, ce concerto célèbre donc le margrave pour son rôle de mécène et patron notoire des arts.
La couleur sombre du Concerto no 6, sans violons, serait traditionnellement associée à la mort, et il existe un parallèle entre ce morceau et et le thème allégorique de “la Rencontre entre les trois vivants et les trois morts” que l’on trouve dans les sources littéraires et visuelles du 17e siècle. Dans le premier mouvement, trois jeunes princes insouciants (les 2 altos et le violoncelle) au retour de la chasse rencontrent trois cadavres, représentés par les trois instruments archaïques : les 2 deux violes de gambe et le violone (ancienne contrebasse). Les figures funestes mettent en garde les trois princes et les incitent à se repentir, car la richesse comme la beauté est condamnée à disparaître. Le paisible deuxième mouvement représente la rédemption des âmes des trois princes, ayant pris conscience de l’avertissement, et l’esprit dansant du mouvement final présente une vision des agneaux de Dieu gambadant dans les prés du paradis.
Le prince Léopold lui même était violiste amateur et la simplicité des parties de viole lui rendait l’œuvre sans doute accessible. Les deux parties d’alto et celle de violoncelle sont notoirement ardues ; on sait de plus que Bach était altiste, ce qui laisse imaginer que ce concerto était destiné personnellement à Léopold et qu’ils le jouèrent ensemble.
*J.S. Bach: The Brandenburg Concertos, A New Interpretation
http://www.recorderhomepage.net/brandenburgs.html
La Partita en ré mineur pour violon seul a été écrite par Bach durant la période 1717-23 et il est possible qu’il l’ait composé à la mémoire de sa première épouse, Maria Barbara Bach. Ecrite en cinq mouvements, l’Allemande contient déjà une allusion à la basse répétée, qui dès lors ne cesse de hanter la pièce jusqu’à faire sa pleine apparition dans la Chaconne. Bien que les quatre premiers mouvements correspondent à la norme baroque d’une suite de danses allemandes, le caractère globalement sombre de la partita est renforcée par la monumentale Ciaccona qui clôt l’œuvre, dépassant en durée la totalité des mouvements précédents. La Chaconne a une structure binaire symétrique : le thème suivi de 30 variations, puis, de nouveau, le thème suivi de 30 variations, pour conclure par le thème et une variation cadentielle (il est à noter que Bach utilisé également la structure de thème avec trente variations dans les Variations Goldberg).
Un sommet du répertoire pour violon solo, englobant tous les aspects de la technique du violon connue à l’époque de Bach, La Chaconne est considérée parmi les pièces les plus exigeantes pour l’instrument. Depuis l’époque de Bach, plusieurs transcriptions de l’œuvre sont apparues pour d’autres instruments, en particulier pour le piano par Ferruccio Busoni et Alexander Siloti, pour piano main gauche par Brahms, ainsi que pour flûte, pour guitare (par Andres Segovia) et récemment une transcription pour basson a été éditée afin de mettre en évidence les capacités des nouveaux systèmes de clés pour cet instrument. Au moins trois transcriptions ont été publiées pour orgue solo ainsi que d’autres pour grand orchestre par Leopold Stokowski et Joachim Raff.
Dans une lettre à Clara Schumann, Johannes Brahms a déclaré au sujet de la Chaconne : “Sur une seule portée, pour un si petit instrument, cet homme écrit tout un monde de pensées les plus profondes et des sentiments les plus puissants. Si je pouvais imaginer d’avoir créé, ou même d’avoir simplement conçu cette œuvre, je suis certain que le bouleversement provoqué par une telle expérience m’aurait fait perdre la tête.”
Né en 1953 à Tokyo, Ichiro Nodaïra étudie la composition à l’Université des Beaux-Arts et de la Musique de Tokyo. En 1978, il obtient une bourse du gouvernement français qui lui permet de poursuivre sa formation au CNSM de Paris. Après l’obtention des Premiers prix en composition, analyse et accompagnement au piano, il participe à différents stages animés par György Ligeti, Franco Donatoni, Peter Eötvös et Brian Ferneyhough. Il mène depuis lors une double carrière de pianiste et de compositeur. De 1994 à 2000, il est directeur artistique de l’ensemble Tokyo Sinfonietta et depuis 1990, il est professeur à l’Université des Beaux-Arts et de la Musique de Tokyo.
Bach a composé quatre suites pour orchestre, aussi surnommées Ouvertures en raison de l’importance du premier mouvement. Les suites sont composées d’une succession de danses variées, le premier mouvement étant toujours une ouverture constituée de deux parties : une lente et une rapide en forme de fugue.
Le célébrissime Air, deuxième mouvement de la 3ème Suite, est souvent appelé Air sur la corde de sol, grâce à une adaptation réalisée par August Wilhelmj pour violon et piano et qu’il jouait entièrement sur sa corde de Sol.
“Jésus que ma joie demeure”, de la cantate BWV 147 Herz und Mund und Tat und Leben (“Le cœur, la bouche, l’action, la vie”) composée durant la période où Bach était à Weimar, a été exécutée à Leipzig le 2 juillet 1723, à l’occasion de la fête de la Visitation de la Vierge Marie.
“Jésus que ma joie demeure à ton nom, à tout jamais. Il guérit toutes les blessures et ma force vient de sa grandeur. Dans l’espoir puis la lumière, il éclaire mon cœur et mon âme. Jour et nuit il m’accompagne. Doux Jésus, Oh Doux Seigneur.”