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  • Axe Anglo-saxon aux Beaux-arts

    Chers amis mélomanes,

    Profitons de l'automne pour nous précipiter à l'Auditorium du Palais des Beaux-Arts de Lille et découvrir de la musique de chambre rarement donnée...

    Fidèles à la tradition Chambre à part vous présente un programme 'anglo-saxon' dimanche 28 octobre à 16h. Programme détaillé ci-dessous.

    Heinrich Kaminski Quintette pour clarinette, cor et cordes   
    Julius Röntgen       Quartettino III
    John Ireland          Sextuor pour clarinette, cor et quatuor à cordes   

    Claire Tuytten, clarinette, Sébastien Tuytten, cor
    Benjamin Boursier et Christina Boursier-Grylsyuk, violons
    Paul Mayes  alto, Catherine Martin  violoncelle

    Billetterie directement au niveau -2 à l'entrée de l'auditorium. Entrée conseillée par le 18 bis rue de Valmy (sauf personnes à mobilité réduite).

    tarif 12 € le concert, tarif réduit 6€ pour les demandeurs d'emploi et 12-25 ans, abonnement Liberté 6 concerts/ 48€

    réservations : lesamischambreapart@orange.fr ou +33 607 626 125

    prochains rendez-vous : samedi et dimanche 10-11 novembre au Consercatoire pour une intégrale Debussy Elgar, voyez le programme de la saison en suivant ce lien : saison 2012-2013

    toute l'équipe de Chambre à part vous attend dimanche 28 octobre.

    Ambre Chapart.

     

     Heinrich Kaminski.jpgHeinrich Kaminski est né à Tiengen dans la Forêt-Noire, fils d’un prêtre de l’Église vieille-catholique. Après avoir travaillé pendant une courte période dans une banque à Offenbach-sur-le-Main, il partit à Heidelberg afin d’étudier le droit. Son destin changea en 1909 quand il rencontra Martha Warburg, qui reconnut son don musical et l’encouragea d’entreprendre des études musicales au Conservatoire Stern à Berlin, avec Severin Eisenberger comme professeur de piano. En 1914, il trouva un poste de professeur de piano à Benediktbeuern en Bavière, et durant la Première Guerre mondiale, il travailla également comme chef de chœur et enseigna la composition. Parmi ses amis du moment, on trouve les peintres Emil Nolde et Franz Marc, dont l’épouse fut de ses élèves. Par la suite, il fut nommé professeur à l’Académie Prussienne des Arts de Berlin, où il succèda à Hans Pfitzner comme directeur de la classe de composition. Dans ses “Mémoires” le plus connu de ses élèves, Carl Orff, dit de son maître : “Issu du romantisme, l’œuvre de Kaminski est essentiellement hymnique : il prêchait à travers sa musique. La polyphonie était pour lui une philosophie et il était possédé d’une étrange ferveur religieuse, ainsi que d’une nature intègre et entière.” Son contrat à Berlin se termina en 1933, n’ayant pas été renouvelé à cause de ses “opinions politiques”, et il dut retourner à Benediktbeuern. Plusieurs tentatives pour retrouver son poste échouèrent. Nommé à la succession de Hindemith comme directeur de l’Académie de Musique à Berlin, le poste lui fut refusé poue les mêmes raisons. Une vérification de son ascendance (il fut catalogué en 1938 comme “demi-juif”, et en 1941 déclaré “quart de juif”) conduisit à une interdiction permanente de l’exécution de ses œuvres en Allemagne. Il fut amené à fuir en France puis en Suisse. Entre 1939 et 1945, il perdit trois de ses enfants et il mourut en 1946 à Ried en Bavière.
    La musique de chambre de Kaminski occupe une place relativement importante dans sa production et ces œuvres ont en commun une intimité, une profondeur et une intensité exceptionnelle. Maître de l’art du contrepoint, il a embrassé comme nul autre compositeur du XXe siècle le style polyphonique, sa construction musicale étant fondée sur l’indépendance des lignes. D’autres éléments clés de sa musique sont l’emploi du polyrythme et la diversité des formes qu’il utilise. La logique autonome des parties individuelles dans les œuvres de Kaminski donne à l’harmonie un caractère kaleidoscopique, et si son langage harmonique s’inscrit tout à fait dans les courants modernes de son époque, il reste néanmoins dans un univers tonal très personnel. Sa musique est également nourrie d’un élément métaphysique issu de sa conviction d’être investi d’une mission à la fois humaniste et religieuse. Il écrit le Quintette pour clarinette, cor et trio à cordes en 1925.

    “Pas celui qui est connu !” C’est ainsi que Julius Röntgen se présentait à des nouvelles connaissances, se sentant dans l’ombre de son grand-oncle, le physicien Wilhelm Conrad Röntgen, découvreur des Julius Röntgen.jpgrayons X. Néanmoins, au cours des festivités pour ses soixante ans, son ami intime, Edvard Grieg, le salua en disant “ Je lui dis que c’est bien lui, celui qui est connu, d’autant plus parce que les rayons X n’arrivent que jusqu’aux os, tandis que la musique de Julius les transpercent !”
    Julius Röntgen a poursuivi une carrière considérable de pianiste, compositeur et chef d’orchestre, d’abord dans sa ville natale de Leipzig et ensuite, à partir de 1878, dans son pays adoptif aux Pays Bas (il fut le soliste du second concerto pour piano de Johannes Brahms lors de la première à Amsterdam, dirigée par le compositeur lui-même, une performance que Brahms’ pourtant critique intraitable, qualifia de “photographie de moi-même”). Toujours ouvert aux nouveaux développements, il s’en servait expérimentalement dans ses œuvres mais restait néanmoins fidèle jusqu’à sa mort au romantisme Brahmsien qu’il a cultivé dès sa jeunesse. Pourtant le caractère sombre et mélancolique de la musique allemande était peu adapté à la personnalité de Röntgen : il était ouvertement hédoniste et ceci s’entend dans sa musique irrigué par un sang chaud. Traditionaliste, il conservait les formes et les genres de la musique du XIXe siècle, et beaucoup de ses compositions emploient le principe cyclique, associé avec César Franck. Soit il utilise un leitmotiv mélodique, soit le morceau finit en se référant au thème du début de la pièce.
    Sa copieuse productivité égale celle de ses contemporains Saint-Saëns et Reger et comme eux, il cultivait une connaissance profonde de la musique ainsi que de la gastronomie. Cinq de ses fils sont devenus des musiciens professionnels, occupant des postes importants de pianiste, violon-solo ou violoncelliste. Son sixième fils a été l’architecte de de la Villa Gaudeamus, où Röntgen résidait au cours de ses dernières années et qui est devenu le domicile de la Fondation pour la musique contemporaine du même nom. “Gaudeamus” (Réjouissons-nous) fait partie du chant étudiant Gaudeamus igitur cité par Brahms dans son Ouverture pour une fête académique et pourrait servir également de devise pour la longue vie prospère et heureuse qui a été celle de Röntgen.
    Il a écrit beaucoup de pièces à usage privé, pour sa famille et ses amis et pour des occasions particulières. Beaucoup de ses compositions de musique de chambre ont été écrites à l’occasionse des fréquentes soirées musicales organisaient dans sa maison familiale. Röntgen prenait alors indifféremment la partie de piano ou d’alto. En terminant souvent les mouvements en pianissimo, il souligne le caractère intime de sa musique de chambre. Les dix-huit quatuors à cordes et les sept Quartettinos non pas été publiés de son vivant, et restent, avec l’exception du Quartetino III, non-édités à ce jour.

    John Ireland.jpg Né le 13 août 1879 dans le Cheshire, de parents bien implantés dans le monde littéraire, John Ireland entre à l’âge de quatorze ans au Royal College of Music de Londres. Il perdit ses deux parents peu de temps après et fut livré à lui-même pour poursuivre ses études de piano, d’orgue et de composition avec Stanford. Plus tard il enseignera lui-même la composition dans la même institution : parmi ses élèves figureront Benjamin Britten, Ernest John Moeran, Alan Bush et Humphrey Searle. De 1904 à 1926, il est organiste et maître de chœurs à l’église St. Luke's de Chelsea. D’abord influencée par Beethoven, Brahms et Dvǒrák, puis par Debussy et Ravel, sa musique n’en est pas moins typiquement britannique, d’un style qu’il est convenu de qualifier d’impressionnisme anglais. Le langage harmonique de John Ireland est riche, et malgré l’influence évidente du romantisme allemand, il a su cultiver un style raffiné et personnel. Son amour de la campagne anglaise, notamment du Sussex, où il s’établira en 1953, et son utilisation de la gamme pentatonique des chants populaires anglais se traduisent dans ses œuvres. John Ireland meurt le 12 juin 1962, dans son moulin de Rock Mill dans le village de Washington.
    Etant étudiant, Ireland n’avait pas suffisamment confiance en ses capacités pour autoriser l’exécution de ses œuvres de cette époque en dehors des confins de Royal College, ni de les publier. Les manuscrits, y compris celui du Sextuor, ont été rangés pour ne plus réapparaître que vers la fin de sa vie. Mais, un jour à la fin des années 50, il receva la visite de la grande dame de la clarinette anglaise, Thea King, qui se préparait à jouer en concert la Fantasy Sonata pour clarinette et piano. En passant, elle lui demanda s’il avait écrit autre chose pour son instrument et c’est à ce moment qu’Ireland sortit le manuscrit du Sextuor d’un tiroir. Malgré ses problèmes de vue et le fait qu’il ne l’avait pas entendu depuis plus de soixante ans, il se souvint de tous les détails de l’œuvre. Finalement il autorisa la création à Londres le 25 mars 1960. Il put y assister, assis au premier rang.
    A l’origine, Ireland avait appelé le morceau Intermezzo, et cette appellation reste en titre du troisième mouvement

  • Françaix - Brahms piano et cordes

    Chers amis mélomanes,

    Dimanche 14 octobre à11h à l'Auditorium du Conservatoire de Lille, le second concert de la saison. Jean Françaix dont nous poursuivons la célébration du centenaire, et Brahms un grand classique, dans le quatuor op.60, moins souvent joué que le premier, opus 25. Chambre à part vous fait ainsi partager la prospection du répertoire.

    Jean Françaix        Divertissement pour trio à cordes et piano  
    Johannes Brahms  Quatuor pour piano et cordes n°3 op.60

    Paulina Sawicka-Pollet  piano, Ken Sugita  violon, Paul Mayes  alto, Catherine Martin violoncelle

    tarif 10€ le concert, tarif réduit 6€ pour les demandeurs d'emploi et 12-25 ans, abonnement Liberté 6 concerts/ 48€

    réservations : lesamischambreapart@orange.fr ou +33 607 626 125

    toute l'équipe de Chambre à part vous attend dimanche 14 octobre, retrouvons-nous autour d'un verre à la sortie pour échanger nos impressions et émotions avec les musiciens

    lisez le programme d"taillé ci-dessous

    prochain rendez-vous : dimanche 28 octobre à 16h au Palais des Beaux-Arts, voyez le programme de la saison en suivant ce lien : saison 2012-2013

    Ambre Chapart

    Programme Détaillé

    Jean Françaix.jpg  “La musique doit chercher humblement à faire plaisir”. Cette phrase que l’on prête à Debussy et qu’il n’a vraisemblablement jamais prononcée, pourrait être la devise de Jean Françaix, tant son art dédaigne les méandres métaphysiques et la recherche expérimentale pour ne retenir que des qualités simplement humaines de l’art musical: un entrain populaire, charmeur ou ironique, parfois voilé de mélancolie ou attisé par une ironie mordante, qualités que l’on attribue en général à la musique française. Or, c’est en Allemagne qu’il connaît son premier grand succès de compositeur (avec son Concertino pour piano et orchestre), et qu’il trouve un éditeur et un public à sa mesure, ce que l’hexagone serait bien en peine de lui procurer aujourd’hui. Bien qu’il confesse en ressentir une certaine amertume cela ne l’a jamais détourné de ses principes, tout au long d’une oeuvre riche et variée, dépassant les 200 numéros et traitant tous les genres, tous impregnés de son esprit ludique. Et quand on lui demande d’où lui vient ce goût pour la légèreté et la grâce spontanée, il répond: “de Mozart”.
    Jean Françaix fut lui aussi un jeune prodige qui reçut, encore enfant, les conseils de Ravel. Selon Arthur Hoérée: “son style a très peu évolué car il a assimilé rapidement tout ce qu’il avait besoin de savoir, et parce qu’il témoigne, avec une fraîcheur miraculeuse qui n’appartient qu’aux enfants, d’un goût inné pour l’invention”. Cette constance stylistique permet de dégager des “tics” d'écriture qui lui sont propres et qui signalent le grand artiste: tout d’abord, l’utilisation de thèmes goguenards piétinant sur quelques notes à la manière de refrains populaires de coupe toujours très régulière, parfois rehaussés d’effets de jazz; ensuite une grande verve rythmique qui se traduit encore plus souvent par une motorique obstinée néo-classique que par des déhanchements syncopés; puis une propension à l’incertitude modale, au mélange équivoque du majeur et du mineur ou d’autres modes allant jusqu’à la polytonalité; l’emploi de formules de carillons, gais ou graves, d’accords avec notes ajoutées, de mystérieux conduits médiévaux avec quintes à vide, procédés attestant un don de coloriste raffiné; enfin, et ce qui est plutôt rare dans la musique française, la préférence pour une écriture contrapuntique aussi minutieuse qu’élaborée.

    Le Divertissement pour trio à cordes et orchestre compte parmi les œuvres majeures de Françaix. Créé le 22 décembre 1935 à Paris, aux Concerts Colonne, sous la direction de Paul Paray, avec en solistes les frères Pasquier, la transcription dans laquelle le piano à lui seul remplace tout l’orchestre, éditée en 1974, présente, de l’avis même du compositeur, de sérieux défis aux interprètes. L’œuvre s’inscrit historiquement dans une série très fournie de concerti grossi, genre revenu subitement sur le devant de la scène entre les deux guerres. Les trois parties de cordes exigent une très grande virtuosité et le registre aigu est très sollicité. Le découpage est classique, en quatre mouvements, avec le Scherzo à deux trios en deuxième position. On pourrait croire, en entendant les premières mesures de l’œuvre, à quelque exposition de fugue. En réalité, l’entrée des trois solistes apporte son lot de musique villageoise, dans laquelle on retrouve toutes les constantes du langage de Jean Françaix: cordes lyriques sèchement ponctuées par l’orchestre-piano, association de timbres recherchées dans lesquelles les pizzicati jouent un rôle important, mélodies brèves et carrées tournant autour de quelques notes, effets “jazzy”, et une très grande habileté à manier le contrepoint. Le Scherzo, à la mesure curieusement binaire, est constitué de petites phrases impertinentes tandis que le premier Trio exploite, en valse cette fois, l’ironie du mode “mijeur” (superposition majeur-mineur); ses dernières mesures, avant le retour du Scherzo, font entendre un carillon grave en quintes à vide, dont la couleur rappelle “La Carpe”, dernière mélodie du “Bestiaire” de Poulenc, écrite dans la même tonalité. Et c’est à un autre carillon, beaucoup plus joyeux et typique de la Douce France, que nous convie le second Trio. Dans l’Andante, très poétique, la polyphonie est soignée, la modalité équivoque à souhait (le morceau débute par un mi dièse dorien), les couleurs doucement changeantes et la thématique unitaire, Le Final est dans le style d’un moto perpetuo. On songe volontiers au Final du Quatuor opus 59 no 3 (précisément en ut majeur) de Beethoven, ainsi qu’à celui du Concerto en sol de Ravel, avec sa polytonalité à michemin entre néo-classicisme et jazz, Au centre, Jean Françaix a ménagé une plage de répit pour ses interprètes d’où l’orchestre (ici le piano) est totalement absent: c’est un moment de récapitulation cyclique des principaux motifs des mouvements précédents préparant la tornade finale, 144 mesures de doubles-croches ininterrompues!

    Moins courante que celle du trio, la forme du quatuor avec piano avait connu ses lettres de noblesse avec Mozart et Schumann, mais elle s’apprêtait à être supplantée par le quintette, à la sonorité plus Johannes Brahms.jpgorchestrale. Outre son caractère encore nettement chambriste mais avec de nombreuses possibilités au niveau de la polyphonie et des timbres, cette formation flattait le goût de Brahms pour les antagonismes, dès lors que le piano entrait en jeu. Ainsi, les trois archets y participent de concert, faisant bloc ou fonctionnant par imitations sous le regard hautain et fortement individualisé du piano, d’où une écriture d’aspect concertant diamétralement opposée aux efforts du compositeur dans la voie du quatuor à cordes.
    C’est pendant son séjour à la cour de Detmold de 1856 à 1862 que Brahms donna naissance à ses trois Quatuors pour piano et cordes. Ne parvenant pas à extraire de sa plume un quatuor à cordes en ut dièse mineur, il eut la bonne idée de réduire les violons à une seule partie, destinée à son ami Joseph Joachim, mais aussi d’y inclure sa propre participation au clavier. Néanmoins, il manquait à cette nouvelle rédaction (futur opus 60) un premier mouvement que sa passion pour Clara Schumann lui inspirera pendant l’été 1875. Cette réalisation tardive eut le mérite de suggérer à Brahms l’idée d’un cycle de trois quatuors dont les deux premiers (ainsi que la majeure partie de l’opus 60) furent élaborés simultanément entre janvier et octobre 1861.
    Ces trois œuvres si dissemblables et si complémentaires sont diversement appréciées: le premier quatuor, op.25, avec ses effets extérieurs, ses ambiances bien définies et son Rondo alla zingarese, a toujours été le plus populaire et le plus facile d’accès. Schoenberg l’orchestra en 1937. En revanche, le climat pastoral et idyllique du Quatuor op. 26 a fait naître bien des malentendus sur le prétendu style “fleur bleue” du compositeur, et cela depuis que le critique Hanslick le jugea “sec et ennuyeux”. Quant au Quatuor op. 60, son contenu autobiographique lui permit d’être facilement admis malgré ses bizarreries tourmentées; au moment de sa publication, il l’accompagna d’une lettre ironique à son éditeur Simrock: “Vous pourriez orner le frontispice d’une tête avec un pistolet pointé dessus, ce qui donne une idée de son contenu. Pour cela je vous enverrai mon portrait”.
    Ebauchée dès 1856, cette partition ne fut terminée qu’en 1875, vers la fin de l’été passé par Brahms à Ziegelhausen, non loin de Heidelberg. Le présent quatuor connut, en effet, plusieurs versions remaniées, notamment en 1861, alors qu’étaient en chantier les deux autres quatuors avec piano. En particulier, il semble que le Scherzo ait été le premier mouvement composé, tandis que l’Allegro initial le fut en dernier, pendant l’été de 1875. Il faut signaler aussi que la tonalité définitive d’ut mineur remplaça l’ut dièse mineur prévu à l’origine. Des trois quatuors avec piano, celui-ci n’est pas simplement le plus beau : œuvre-confession sans doute de sa passion désespérée pour Clara Schumann, il est le plus libre, s’évadant maintes fois des rigueurs classiques, guidé par la seule inspiration et par l’émotion du moment, mariant sans effort apparent la fougue juvénile et la complète maîtrise d’écriture d’un Brahms ayant seulement dépassé la quarantaine. La partition, publiée dès 1875, fut exécutée pour la première fois à Wiesbaden, devant le Landgraf et la princesse de Hesse (grands admirateurs du musicien), en février 1876, Brahms tenant la partie de piano.
    Notons, par ailleurs, qu’en transposant l’opus 60 d’ut dièse à ut mineur, Brahms rendait hommage à la tonalité “tragique” de Beethoven, mais son influence s’avère ici assez limitée quoiqu’en ait dit le violoniste Hellmesberger, créateur des deux premiers opus en compagnie de Clara Schumann, qui proclama que Brahms était “l’héritier de Beethoven”.